« Mon nom est Tiziano Cruz. Je viens d’un village appelé San Francisco dans le département de Valle Grande de la province de Jujuy, dans le nord de l’Argentine. Je suis né et j’ai grandi sur la frontière entre le Chili et la Bolivie ; les terres sur lesquelles j’ai couru durant toute mon enfance réunissent neuf communautés indigènes. Je leur dédie cette pièce. »
Ainsi débute la conférence performative qui ouvre Soliloquio (Je me suis levé et je me suis cogné la tête contre le mur). Une dédicace aux peuples oubliés proférée à ciel ouvert, sur la rue qui mène au théâtre auquel n’accèdent pas les corps noirs. Comment être migrant·e sur son propre territoire ? Comment sortir de ces espaces d’invisibilisation, de discrimination, d’aporophobie* ?
Ce sont 58 lettres envoyées de Córdoba par Tiziano Cruz à sa mère durant le confinement qui ont inspiré la dramaturgie de ce prologue dans lequel sont décrits les travaux de son village, les rites, le tressage coloré dont on couronne les bêtes pour s’attirer les bienfaits de la Pachamama… Revêtu des signes de ce folklore triomphant, le performeur entre en scène pour confronter l’art à ses multiples identités. Une performance solitaire, tremblante et puissante.

* Le mot désigne la peur et l’hostilité à l’égard des personnes qui vivent dans la pauvreté et la précarité.

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